Apprendre grâce aux jeux vidéo

de | 21 janvier 2017

Dans cet article, je ne vais pas parler des serious games (des jeux qui ont pour but premier d’être éducatifs, et ont pour option d’être amusants). Ici, je vais vous parler de véritables jeux vidéo qui du fait de leur complexité explicite ou implicite nous apprennent des choses. Ces jeux représentent une très grande partie des jeux vidéo grand public. Ici j’adopterai le point de vue de la personne qui reçoit le savoir et qui doit l’assimiler et pas le point de vue du professeur.

La problématique :

Le problème principal du système éducatif actuel est qu’il n’est pas assez concret et repose trop souvent sur de l’apprentissage par cœur. Ici, je parlerai plus particulièrement du système éducatif français, car je ne sais pas s’il est le même dans toute la francophonie, ou ne serait-ce que dans les mêmes classes : chaque professeur ou enseignant étant un être humain et non pas une machine, il existe de bons profs et des mauvais profs. Attention, je ne dis pas que le par cœur est inutile (loin de là), mais qu’il est trop utilisé actuellement et qu’aucune alternative n’est proposée sauf cas exceptionnel une ou deux fois dans l’année. On ne nous apprend tout simplement pas comment apprendre. Quant au manque de concret, cela revient souvent au fait où quand nous apprenons quelque chose de nouveau à l’école, nous l’apprenons d’abord de manière abstraite ce qui est une énorme erreur. En effet, l’abstraction est un luxe que seuls les experts peuvent se permettre d’utiliser tout en conservant la qualité de la compréhension, mais il faut avant tout commencer par des choses concrètes. Si vous avez déjà lu des articles scientifiques, ces derniers sont remplis de concepts abstraits (hautes performances, basse consommation, meilleur rendement,..). Les auteurs peuvent se le permettre, car cet article s’adresse à d’autres experts, mais il n’est pas destiné aux néophytes et je vous déconseille très fortement d’apprendre une matière ou autres compétences à l’aide d’article scientifique sans avoir une bonne base avant.

Si vous voyez une chose pour la première fois, c’est un concept abstrait. Même les nombres, outils utilisés tous les jours, sont des concepts abstraits, Wikipedia Nombre. Je reprends notamment un passage de Wikipédia :

Au IVe millénaire avant notre ère, les civilisations mésopotamiennes utilisent ainsi des boules creuses d’argile contenant des jetons, puis des tablettes d’argile munies de marques. Un système de notation (dit « système S ») est employé pour la désignation des quantités discrètes, tandis que les surfaces et autres grandeurs sont représentées chacune selon un système de notation propre. Il faut attendre la fusion de ces systèmes, à la fin du IIIe millénaire avant notre ère, pour voir se former véritablement le concept du nombre abstrait, indépendant de ses réalisations concrètes.

Dans cet extrait, on remarque bien que les personnes utilisaient des objets concrets avant de passer au concept abstrait, il n’est donc tout simplement pas naturel d’introduire des nouveaux concepts en passant d’abord par l’abstraction.

Prenez un livre de cuisine par exemple, quelqu’un qui n’a jamais cuisiné et lit une recette. Quand il tombe sur : « Mélangez vigoureusement jusqu’à obtenir une consistance onctueuse. »  Les mots « vigoureusement » et « onctueuse » ne donnent absolument aucune information pour des néophytes. Savez-vous ce que les néophytes réclament alors? Une photo, une vidéo, une mesure quelconque. Et c’est pour cela que les blogues de cuisines qui marchent le mieux sont souvent ceux qui utilisent la vidéo.

A l’école, les difficultés qui viennent très souvent et très rapidement sont les soustractions et les fractions. Ici je parlerai seulement des soustractions par souci de clarté. Imaginez que l’on vous présente pour la première fois le concept de soustraction et que l’on vous demande : « 2-1 c’est égal à quoi? ». Eh bien, à l’époque, je m’en souviens très bien, je n’avais absolument aucune réponse. Je savais ce que le mot « moins » voulait dire, mais impossible de donner la réponse. On m’a ensuite demandé, « Si, tu as deux bonbons, et que je t’en enlève un, combien de bonbons te reste-t-il? », aucune réponse non plus, car j’ai remarqué tout de suite que c’était une manière déguisée de me poser la question précédente et il m’était alors impossible de passer à autre chose que 2-1=?. Si l’on m’avait posé la question dans l’autre sens en commençant par les bonbons, je suis sûr que j’aurais pu répondre, tout simplement, car la situation s’est déjà présentée. J’ai déjà partagé des bonbons avec mes camarades et je savais que si j’en donnais, il m’en restait un de moins. Dans les écoles asiatiques de l’Est, les soustractions ne posent absolument aucun problème pour une raison extrêmement simple : les professeurs présentent la soustraction d’abord de manière concrète à l’aide de supports physiques. Cela peut être des allumettes, des quilles, des canettes et les enfants jouent. Un jeu connu est celui d’empiler des canettes, demander à un enfant de faire rouler une balle et de compter le nombre de canettes tombé. On propose alors à l’enfant d’enlever les canettes qui sont tombées, mais avant, il doit dire au professeur combien de canettes il y avait au total, combien de canettes sont tombées et combien de canettes reste-t-il? Et là, un grand miracle se produit, l’enfant répond correctement. Attention, durant toute la durée du jeu, le professeur n’utilise jamais le mot « soustraction », mais peut employer des dérivées que l’enfant connaît déjà. Nous retrouvons aussi cette méthode d’apprentissage sur le site : http://www.enseignons.be/. Plus particulière la fiche sur la soustraction préparation soustraction cours.

Que ce soit clair, il est tout à fait possible d’apprendre en commençant par l’abstrait, c’est même comme cela que je l’ai fait pendant presque toute ma scolarité avec des notions de plus en plus abstraites et qui me donnaient l’impression d’être totalement inutiles avant de comprendre 5 ans plus tard l’intérêt des concepts. Je dis simplement que s’il existe une autre façon, qui utilise beaucoup moins d’énergie, qui donne plus de résultats et de manière systématique, je prendrai la deuxième solution.

Le jeu vidéo comme support d’apprentissage :

D’ailleurs, cette solution, je l’ai prise sans m’en rendre compte. J’aurais aimé que quelqu’un me le dise clairement, cela m’aurait en plus permis de bien poser ce que je comprends et d’en tirer le maximum. Cette solution, c’est le jeu vidéo. Mais j’ai aussi une idée de pourquoi je n’ai pas reconnu ces concepts abstraits quand je les utilisais de manière très concrète et naturelle quand je jouais aux jeux vidéo. Les concepts présentés à l’école, même si pratiquement assimilés, étaient encore trop abstraits pour réaliser qu’ils servaient à quelque chose. De plus, quand je parlais de jeux vidéo, l’expression qui revenait le plus souvent était « perte de temps ». J’ai été franchement idiot de les croire.

Les jeux vidéo peuvent être l’objet concret que vous recherchez pour apprendre des choses variées. Même si le jeu vidéo est en lui-même un concept abstrait au départ, le fait de l’avoir en main vous fait tout de suite comprendre ce qu’est un jeu vidéo, comparer cet effet à celui des fractions par exemple. Plus la mécanique du jeu vidéo est complexe et plus elle vous permettra d’apprendre et d’utiliser des concepts. Je parle ici de jeux vidéo classiques, pas de jeux vidéo ludo-éducatifs.

Un jeu de voiture (Need for speed) peut vous permettre par exemple de comprendre le concept d’adhérence, de vitesse, il peut aussi vous permettre de comprendre ce qu’il faut faire pour faire un virage serré. La première fois qu’un enfant joue à un jeu de courses, il garde le pied (le doigt) sur l’accélérateur (la touche pour accélérer) puis il comprend petit à petit (chacun son rythme) qu’il doit ralentir s’il veut prendre certains virages.

Un jeu de rôles (Fallout, Mass effect) vous fait apprendre le principe de couverture, de compétences, de travail en équipe : avoir par exemple une équipe dont les membres ont des compétences complémentaires. Mais aussi vous font ressentir des émotions très vives. Je me souviens par exemple des textes que je devais lire : « Ce passage est triste parce qu’elle dit qu’elle a envie de pleurer », merci pour cette analyse! Là où dans le jeu vidéo, l’acolyte de votre personnage principal va se faire enlever. Un peuple est en train de mourir de soif et vous devez aller leur chercher de l’eau et une solution durable. Certains moments vous poussent même à faire des choix difficiles, vous permettant d’en apprendre plus sur vous-même. Toutes les décisions que vous allez prendre seront concrètes, l’histoire va changer selon les décisions que vous avez prises. Il m’est d’ailleurs impossible de jouer un personnage mauvais dans les jeux de rôle, c’est tout simplement au-dessus de mes forces.

Un jeu de stratégie vous apprendra le concept de ressources, d’attaque, de défense. Vous apprendrez aussi que certains paramètres sont importants et qu’il existe une façon de les utiliser de manière optimale. (Nous avons déjà vu plus de concepts dans les articles précédents, le but de cet article n’est pas de faire une liste exhaustive de tout ce qu’on peut trouver dans un jeu vidéo).

Un jeu d’aventures (The last of us) vous poussera à explorer les moindres recoins de l’univers dans lequel vous êtes plongé. Gérer ses ressources, gérer son approche, avoir des amis pour s’entraider etc…

Les possibilités sont infinies avec le jeu vidéo, assurez-vous seulement de respecter les PEGI 3, 7, 12, 16, 18 un minimum. Vous pouvez passer outre si vous savez que vous êtes assez mature ou que vos enfants le sont assez pour jouer à la restriction supérieure. Ici pas question de jouer à un GTA 5 quand on a 12 ans… D’ailleurs ce jeu très critiqué sur sa violence renferme une quantité d’informations incroyables, mais encore faut-il être assez mature pour pouvoir passer outre.

De plus, les jeux vidéo se rapprochent de plus en plus du cinéma, augmentant ainsi la complexité de l’intrigue, la consistance des personnages, la profondeur du scénario. Imaginez être l’acteur principal de votre film préféré. Le concept d’être aux premières loges ne veut plus rien dire ici, vous êtes à la seule place qui compte et le meilleur dans tout cela, c’est que vous pouvez partager cette expérience.

En conclusion, il y a de nombreuses façons d’apprendre, toutes ces façons sont bonnes jusqu’à une certaine limite, y compris pour le jeu vidéo. Alors ne vous fermez pas de portes sous prétexte que des adultes qui ne comprennent pas le jeu vidéo et qui l’assimilent à une perte de temps, un désir de tuer, un isolement et autres conneries que l’on peut lire et entendre. Je pense que, maintenant, vous l’aurez compris, si vous êtes sceptique, que vous avez des doutes, essayez un jeu vidéo (du genre qui vous plaît en vous rapprochant des genres du cinéma par exemple) et essayez par vous-même pour voir ce qui marche pour vous!

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